Ce village de la Somme cache des galeries souterraines qui ont servi de refuge pendant des siècles, une visite historique poignante

Ce village de la Somme cache des galeries souterraines qui ont servi de refuge pendant des siècles, une visite historique poignante

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Rédigé par Amélie

26 septembre 2025

Au cœur de la campagne picarde, le village de Naours abrite un secret enfoui à trente mètres sous terre. Loin d’être une simple curiosité géologique, cette immense cité souterraine est un livre d’histoire creusé dans la craie, un refuge où des milliers de personnes ont trouvé abri face aux fureurs du monde extérieur pendant près d’un millénaire. Ses galeries silencieuses racontent une épopée humaine faite de peur, d’ingéniosité et de survie, un patrimoine exceptionnel qui offre aujourd’hui une visite poignante et inoubliable.

Découverte des grottes de Naours : une immersion souterraine

Un réseau labyrinthique sous la terre

La cité souterraine de Naours n’est pas une simple grotte, mais un véritable village organisé sous la surface. S’étendant sur près de deux kilomètres, le réseau compte 28 galeries et plus de 300 chambres creusées à la main directement dans la craie blanche caractéristique de la région. En parcourant ces couloirs, on découvre des places publiques, des étables pour les animaux, une chapelle et même des puits d’aération et des cheminées dissimulées en surface. L’ingéniosité du système témoigne d’une organisation sociale complexe, pensée pour permettre une vie quasi normale en autarcie complète pendant de longues périodes.

Une atmosphère unique et préservée

Pénétrer dans les souterrains de Naours, c’est entrer dans un autre monde. La température y est constante, avoisinant les 9,5°C toute l’année, et le silence n’est rompu que par les pas des visiteurs et la voix du guide. L’humidité ambiante et l’odeur de la terre et de la craie renforcent ce sentiment d’immersion totale. C’est une expérience sensorielle qui transporte immédiatement le visiteur des siècles en arrière, lui faisant ressentir la claustration et la précarité de ceux qui s’y sont réfugiés.

Cette architecture souterraine n’est pas le fruit du hasard, mais bien la réponse à des siècles de troubles et d’insécurité qui ont marqué l’histoire de la Picardie.

Histoire fascinante de la cité souterraine

Des origines anciennes : les « muches » picardes

L’histoire de la cité commence bien avant sa redécouverte. Dès le haut Moyen Âge, les habitants de la région, alors en proie à de nombreuses invasions, ont commencé à exploiter d’anciennes carrières de craie pour en faire des refuges. Ces cachettes, appelées « muches » en picard (du verbe « mucher », se cacher), furent considérablement agrandies au cours des 16e et 17e siècles, durant les guerres de Religion et la guerre de Trente Ans. Les familles pouvaient y dissimuler leurs récoltes, leur bétail et leurs biens les plus précieux pour échapper aux pillages des armées de passage.

La redécouverte par l’abbé Danicourt

Tombée dans l’oubli pendant près de deux siècles, la cité souterraine fut redécouverte de manière quasi fortuite en 1887 par l’abbé Ernest Danicourt, curé du village. Passionné d’archéologie, il entreprit un travail de déblaiement titanesque qui dura plusieurs années pour rendre les galeries de nouveau accessibles. C’est grâce à sa persévérance que ce patrimoine exceptionnel fut sauvé de l’oubli et ouvert au public dès le début du 20e siècle, devenant rapidement une attraction touristique et un lieu de mémoire.

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L’histoire de ces galeries ne s’arrête pas au Moyen Âge. Leur utilité s’est révélée cruciale lors des grands conflits qui ont secoué l’Europe.

Le rôle des galeries pendant les conflits

Un refuge durant les guerres de religion et la guerre de Trente Ans

Pendant les périodes les plus troubles de l’histoire de France, la cité souterraine a joué son rôle de refuge à la perfection. Les familles du village de Naours et des environs pouvaient y vivre en quasi-autarcie pendant plusieurs semaines. Les vastes salles servaient de logements, les niches d’étables et les « places » de lieux de rassemblement. Ce système de défense passive a permis de préserver des vies et des ressources, assurant la survie de la communauté face à la violence qui sévissait en surface.

La Première Guerre mondiale : un cantonnement pour les soldats

Durant la Grande Guerre, la région de la Somme fut au cœur des combats. Si les galeries n’ont pas servi de ligne de front, elles ont trouvé une nouvelle vocation. Situées à l’arrière du front, elles furent visitées par des milliers de soldats alliés, notamment des Australiens, des Britanniques et des Canadiens, qui venaient s’y reposer lors de leurs permissions. Pour ces hommes venus de loin, la découverte de ce lieu insolite était une distraction bienvenue, une parenthèse loin de l’horreur des tranchées.

Ces soldats, venus des quatre coins du monde, n’ont pas seulement traversé ces galeries ; ils y ont laissé des traces indélébiles, gravées à même la craie.

Les graffitis 14-18, témoignages poignants du passé

Plus de 3 000 signatures du front

L’un des aspects les plus émouvants de la visite est la découverte des milliers de graffitis laissés par les soldats du Commonwealth entre 1916 et 1918. Sur les murs de craie, on peut lire plus de 3 000 inscriptions : des noms, des dates, des numéros de régiment et parfois des dessins. Ces signatures, tracées au crayon ou gravées avec un couteau, sont les derniers témoignages de ces jeunes hommes, dont beaucoup ne sont jamais rentrés chez eux. Chaque nom est une histoire, un visage que l’on imagine dans la pénombre des galeries.

Un mémorial souterrain international

Ces graffitis transforment la cité souterraine en un mémorial spontané et unique au monde. Ils constituent une archive historique d’une valeur inestimable, étudiée par des historiens du monde entier. Ils nous rappellent que derrière les grandes dates et les stratégies militaires, la guerre était avant tout une affaire d’hommes. La diversité des noms et des origines illustre le caractère mondial du conflit et rend un hommage personnel et touchant à la génération sacrifiée de 14-18.

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Ces inscriptions silencieuses transforment la simple exploration des grottes en une véritable rencontre avec l’histoire, une expérience que les visiteurs d’aujourd’hui peuvent à leur tour partager.

Visiter la cité, un voyage dans le temps

Le parcours de la visite guidée

La visite de la cité souterraine se fait obligatoirement en compagnie d’un guide. Le parcours, d’une durée d’environ une heure, est scénarisé pour faire revivre l’histoire du lieu. Les guides, passionnés et documentés, partagent des anecdotes et des faits historiques qui rendent l’expérience vivante et accessible à tous les publics. On découvre les lieux de vie, la chapelle avec son autel rudimentaire, et bien sûr les fameux murs recouverts de graffitis.

Le parc et le musée des métiers anciens

Le site de Naours ne se limite pas à ses galeries. En surface, un parc arboré de 10 hectares offre un cadre agréable pour une promenade. Il abrite également un musée des métiers picards d’autrefois, présentant des outils et des ateliers d’artisans (forgeron, sabotier, etc.), ainsi qu’un moulin à vent. C’est un complément parfait à la visite souterraine, permettant de mieux comprendre la vie quotidienne des habitants qui utilisaient les « muches ».

Informations pratiques (à titre indicatif)

CatégorieDétail
Durée de la visiteEnviron 1h pour les souterrains, prévoir 2h à 3h pour l’ensemble du site
Température9,5°C constants (prévoir des vêtements chauds)
AccessibilitéLe site souterrain comporte des escaliers et n’est pas accessible aux personnes à mobilité réduite ni aux poussettes
Langues des visitesFrançais, Anglais, Allemand, Néerlandais (selon disponibilité)

Pour profiter pleinement de cette plongée dans les entrailles de l’histoire picarde, quelques préparatifs simples s’imposent.

Astuces pour une visite réussie

S’équiper pour le froid et l’obscurité

La recommandation la plus importante est de se vêtir chaudement. Même en plein été, la température dans les galeries ne dépasse pas les 10°C. Un pull ou une veste est indispensable. Le sol pouvant être humide et inégal par endroits, il est fortement conseillé de porter des chaussures fermées et confortables. Bien que le parcours soit éclairé, l’ambiance est tamisée, ce qui participe au charme de la visite.

Accessibilité et informations pratiques

Il est d’usage de noter que le parcours souterrain n’est pas adapté aux fauteuils roulants ni aux poussettes en raison des nombreux escaliers. Pour les familles avec de très jeunes enfants, un porte-bébé est la seule solution envisageable. Il est également judicieux de consulter le site internet officiel avant votre venue pour vérifier les horaires d’ouverture, qui peuvent varier selon la saison, et pour réserver vos billets en ligne, surtout pendant les périodes de forte affluence touristique.

  • Conseil 1 : Portez des vêtements chauds, quelle que soit la saison.
  • Conseil 2 : Chaussez-vous confortablement pour marcher sur un sol parfois irrégulier.
  • Conseil 3 : Réservez vos billets à l’avance pendant les vacances scolaires pour éviter les files d’attente.
  • Conseil 4 : Prenez le temps de visiter le parc et le musée pour une expérience complète.
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La cité souterraine de Naours est bien plus qu’une simple attraction. C’est un lieu de mémoire puissant, un témoignage exceptionnel de la résilience humaine face à l’adversité. De refuge médiéval à lieu de repos pour les soldats de la Grande Guerre, ses murs de craie portent les cicatrices et les espoirs de plusieurs générations. Visiter Naours, c’est marcher sur les traces de milliers d’anonymes et écouter le récit silencieux mais éloquent d’une histoire profondément humaine.

Amélie

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